Ceci est un inventaire de tout ce qu’il y aurait à expulser. La formulation « expulsion des biens et des corps » sort tout droit de l’assignation pondue par l’avocat de la mairie de St-Jean-du-Gard. Texte diffusé à la suite de la réception de cette assignation au tribunal. Nouvelle version du texte « Expulsion des biens et des corps« . Version pdf – Version audio
Ici comme partout, les signes sont nombreux et de plus en plus clairs, de ce que veulent pour nos vies les pouvoirs en place : « mise aux normes »disent-ils, mais c’est d’une mise au pas qu’il s’agit, et de la normalisation de toutes les formes du vivants et du non-vivant. Du contrôle technique des véhicules, au cahier des charges des paysans, en passant par la vaccination obligatoire, la mise sous tutelle des récalcitrants, ou la surveillance aux frontières, les exemples ne manquent pas ! Ce qu’ils appellent « sécurité » est en réalité contrôle.
Heureusement, les résistances elles aussi sont multiples et partout. La Borie est l’une d’elles, et comme les autres, elle est menacée. Les termes juridiques sont :
expulsion des biens et des corps
Petit inventaire rapide :
9 chats, 7 chiens, 2 ânes, un cheval, quelques millions d’abeilles, une chèvre, quelques dizaines d’humains petits et grands, plus de 500 ami-es solidaires et occupant-es intermittent-es, plusieurs milliers de livres, des savoirs-faire, des pratiques et des secrets, des centaines de plantes sous forme de tisanes, d’onguents, de teintures-mères, une bonne douzaine de poêles à bois, autant d’habitats mobiles ou éphémères, une yourte et sa cuisine attenante, 3 ateliers, des ciseaux, des couteaux, des marteaux, des haches, des balais, un chaudron, une boule de cristal, 4 tronçonneuses, 2 mielleries, une boulangerie, une sorcellerie, 2 serres, des arbres fruitiers et des arbres à grimper, des champs de légumes, des prairies de plantes et d’insectes sauvages, de la jachère, de la pâture, des aromatiques et des fleurs cultivées, des graines semées, des centaines de piquets plantés, des souvenirs, une machine à coudre, à café, à laver, à bois, à écrire, un tour à poterie, un pressoir à pommes, un piano à queue, un accordéon à boutons, une clarinette, une batterie, quelques guitares, plusieurs percussions, un didgeridoo, un xylophone, 2 ukulélé, un saxophone, une licorne à bascule, un ogre dans l’escalier, une caisse de kapla, des crayons, des feuilles et de pots de peinture, des galets, des murs en pierres, des plages et des rochers à escalader, une rivière à laisser couler, beaucoup d’eau sous les ponts, deux toboggans, une balançoire, un miradors et ses pirates, 2 hamacs, 2 roulottes, 3 trottinettes, une floppée de ballons, une draisienne, des vélos, 15 bagnoles, 7 camions, 3 téléphones, des bocaux de confitures, des pots de miel, des conserves de fruits, d’autres de légumes, des bouteilles de jus de pomme, de cidre, d’hydromel, de vin de plantes, des gardes-manger, des patates par milliers, des kilos de farine, un certain nombre de cendriers, de monstres dans les bois, de lampes frontales, de génies de la rivière, d’attrape-rêves, de théières et de plats à tajine, des cartes, un scrabble, des échecs, une hutte de sudation, un nid de marsupilami, des boîtes à lettres, à clous, à bijoux, à joujoux, à genoux, à hiboux, des carnavals, des bals, des festivals, des idéals,, bref : la Borie.
Alors plus que jamais, nous souhaitons la bienvenue :
à l’impromptu, à l’inopinée, aux cabanes dans la forêt, à la bricole, à la débrouille, aux poseurs de tentes et autres coinceurs de bulle, aux voyageurs de l’espace-temps, aux marmots de tout poils, aux frangines féministes, aux pirates du monde moderne, aux flibustières du rafiot domestique, aux rebrousse-poils des coupes à blanc, aux insolvables, aux insolubles, aux crottés et autres indécrottables, aux crapules de l’école des bois, aux éjectés de la croissance, aux déracinés des grandes cultures, aux échappées belles, aux apatrides et sans frontières, aux agités de la cervelle, aux vagabondages et bavardages, à la joie et à la colère, aux cueilleuses de remèdes, aux coureuses de jupon, aux fantaisistes, aux intrépides, au saccage de toute docilité, à l’insolence, aux rêveuses, aux lucides, à la musique ou au tapage, aux irréductibles, aux incurables.
Nous sommes une multitude.
Nos moyens sont infinis.
Nous continuerons de vivre sur ces terres, sous ces toits.
Aucun verdict ne remettra en cause la légitimité
de nos luttes et de nos existences.
Parce qu’au delà de nos corps et de nos biens,
ce sont des histoires, des imaginaires
et des espoirs que nous défendons
la Borie est commune
et le restera.