Une reponse à l’assignation en justice qui nous fut presenté par huissier le 3 janvier. Version pdf
À la Borie, nous recevons une lettre du maire. Des vœux de bonne année ? Que nenni : une assignation en justice dont le mot d’ordre est :
expulsion des biens et des corps
Petit inventaire rapide : 9 chats, 7 chiens, 2 ânes, 2 chevaux, quelques millions d’abeilles, une chèvre, 41 humains dont 10 enfants, plus de 500 ami-es solidaires et occupant-es intermittent-es, plusieurs milliers de livres, des savoirs-faire, des pratiques et des secrets, des centaines de plantes sous forme de tisanes, d’onguents, de teintures-mères, une bonne quinzaine de poêles à bois, autant d’habitats mobiles ou éphémères, une yourte et sa cuisine attenante, 3 ateliers, des ciseaux, des couteaux, des marteaux, des haches, des balais, un chaudron, une boule de cristal, 4 tronçonneuses, 2 mielleries, une boulangerie, une sorcellerie, 2 serres, des arbres fruitiers et des arbres à grimper, des champs de légumes, des prairies de plantes sauvages, des aromatiques et des fleurs cultivées, des graines semées, des centaines de piquets plantés, des souvenirs, une machine à coudre, à café, à laver, à bois, à écrire, un tour à poterie, un pressoir à pommes, un piano à queue, un accordéon à boutons, une clarinette, une batterie, quelques guitares, plusieurs percussions, un didgeridoo, un xylophone, 2 ukulélés, un saxophone, une licorne à bascule, un ogre dans l’escalier, une caisse de kapla, des crayons, des feuilles et des pots de peinture, des galets, des murs en pierres, des plages et des rochers à escalader, deux toboggans, une balançoire, 2 roulottes, 3 trottinettes, un ballon, une draisienne, des vélos, 15 bagnoles, 7 camions, 3 téléphones, des bocaux de confitures, des pots de miel, des conserves de fruits, d’autres de légumes, des bouteilles de jus de pomme, de cidre, d’hydromel, de vin de plantes, des gardes-manger, des patates par milliers, des kilos de farine, un certain nombre de cendriers, de monstres dans les bois, de lampes frontales, de génies de la rivière, d’attrape-rêves, de théières et de plats à tajine, des cartes, un scrabble, des échecs, une hutte de sudation, un nid de marsupilami, des boîtes à lettres, à clous, à bijoux, à joujoux, à genoux, à hiboux, des carnavals, des bals, des festivals, des idéals, bref : la Borie.
Alors plus que jamais, nous souhaitons la bienvenue : à l’impromptu, à l’inopinée, aux cabanes dans la forêt, à la bricole, à la débrouille, aux poseurs de tentes et autres coinceurs de bulle, aux voyageurs de l’espace-temps, aux marmots de tout poils, aux frangines féministes, aux pirates du monde moderne, aux flibustières du rafiot domestique, aux rebrousse-poils des coupes à blanc, aux insolvables, aux insolubles, aux crottés et autres indécrottables, aux crapules de l’école des bois, aux éjectés de la croissance, aux déracinés des grandes cultures, aux échappées belles, aux apatrides et sans frontières, aux agités de la cervelle, aux vagabondages et bavardages, à la joie et à la colère, aux cueilleuses de remèdes, aux coureuses de jupon, aux fantaisistes, aux intrépides, au saccage de toute docilité, à l’insolence, aux rêveuses, aux lucides, à la musique ou au tapage, aux irréductibles, aux incurables.
Nous sommes une multitude.
Nos moyens sont infinis.
Nous continuerons de vivre sur ces terres, sous ces toits.
Aucun verdict ne remettra en cause la légitimité de nos existences.
Nos biens et nos corps sont inexpulsables puisqu’ils font partie intégrante de l’histoire et de ces lieux.
La Borie est commune… et le restera.